QCM en pair-à-pair à SKEMA : pour une prépa collaborative aux grandes écoles de commerce où les étudiants ne s’opposent pas

QCM en pair-à-pair à SKEMA : pour une prépa collaborative aux grandes écoles de commerce où les étudiants ne s’opposent pas

Existe-t-il une alternative à la méthode d’apprentissage traditionnelle des prépas aux épreuves écrites des grandes écoles de commerce ? À l’ESDHEM de SKEMA Business School, nous avons pris le pari que oui. Un an après son lancement, notre nouvelle méthode horizontale a permis de renforcer l’échange avec les professeurs et de créer entre étudiants une véritable communauté d’apprentissage.

« Je l’ai vu un peu comme un jeu. Et en jouant, on apprend facilement. » Eliott Maupin a fait partie des étudiants de la première prépa de l’ESDHEM à bénéficier de la nouvelle méthode d’apprentissage que nous avons mise en place, l’an dernier, à SKEMA Business School : le QCM en pair-à-pair.

Cette nouvelle façon transversale de préparer les épreuves écrites des concours d’accès aux grandes écoles de commerce, nous l’avons imaginée, pensée et testée pour deux raisons :

1/ optimiser la présence en classe de nos professeurs

2/ et faire participer tous les étudiants à la réussite de chacun et chaque étudiant à la réussite de tous.

Une simple observation de la réalité de ce type de préparation m’a convaincu qu’il fallait bousculer les pratiques traditionnelles utilisées partout ailleurs.

Le QCM en pair-à-pair ou la méthode des mousquetaires

Ces épreuves écrites sont un exercice chronométré de réponses à des questions types. Les réussir réclame donc un effort de répétition, qui passe par la révision des annales et le passage de tests d’entraînement. Cet effort n’était pas à remettre en cause, mais il me semblait qu’il pouvait être mieux orchestré. J’avais sous les yeux des tests qui se faisaient dans le cadre des cours, mais aussi en dehors quand, de manière informelle, les étudiants se réunissaient pour s’entraider.

Alors un jour, je me suis posé deux questions :

– Y a-t-il une meilleure façon d’utiliser les compétences de nos professeurs qu’en leur faisant faire de la surveillance ?

– Peut-on rendre le travail collectif de nos étudiants plus efficace ?

Spoiler alert : dans les deux cas, la réponse est « oui ».

J’étais face à ce constat, avec une idée imprécise des solutions à y apporter. J’en ai parlé à Vaitea Jacquier, notre responsable de l’Innovation pédagogique (Direction Innovation & Learner Experience), et nos échanges m’ont permis de trouver une réponse structurante et de mettre en place ce projet.

La méthode du QCM en pair-à-pair prend le contre-pied de la plupart des prépa-concours, structurées autour d’un enseignement magistral des professeurs et d’un pur « bachotage » demandé aux étudiants. Ici, loin de développer une compétition entre eux, comme c’est souvent le cas autrement, notre nouvelle méthode donne un cadre à leurs échanges et implique davantage le professeur dans leur apprentissage.

Par-delà vrai et faux

« A la fin de chaque cours, j’envoie mon QCM aux étudiants sur la plateforme Challenge Me qui permet de le faire dans un temps imparti, m’a expliqué Adeline Lecardez, qui enseigne au sein de l’ESDHEM. Et au début du cours suivant, on fait un point sur le challenge. C’est devenu un rituel, les étudiants me réclament eux-mêmes le QCM pour la semaine suivante ! »

« A chaque fois, on doit corriger les résultats des autres étudiants, me racontait Eliott, amusé de se retrouver dans la peau du correcteur. Ça nous permet de nous entraider et d’avancer sur certains points qu’on n’avait pas forcément compris en cours. On faisait même une réunion entre nous avant les cours pour décider des sujets à revoir avec la prof. »

On s’est très vite rendu compte que le développement de cette logique collaborative a permis de créer une véritable communauté d’apprentissage entre les étudiants. L’idée de départ était de dépasser l’idée préconçue qu’on se fait des QCM, c’est-à-dire bon ou faux, sans aucune réflexion derrière. Ici, pour pouvoir s’entre-corriger, les étudiants sont naturellement poussés à aller chercher la bonne information, et donc à apprendre par eux-mêmes.

« Toutes les semaines on se voit progresser »

« Toutes les semaines on se voit progresser, selon Eliott. Au début, on fait pas mal d’erreurs et c’est en faisant ces erreurs qu’on apprend. Etant donné qu’on a un feedback derrière, on se rend compte des erreurs qu’on a faites. Et entre étudiants, c’est toujours dans une logique bienveillante, c’est ça qui est sympa. »

Pour vérifier cette impression, nous avons mené un sondage anonyme auprès des 1 077 étudiants internationaux concernés sur nos trois campus français (Lille, Paris et Sophia-Antipolis). Et elle s’est vérifiée : la grande majorité d’entre eux s’est dit « à l’aise pour évaluer ses camarades » et a une perception positive du pair-à-pair.

Mais comme toute méthode d’enseignement est vivante, notre prochain défi sera de former les étudiants, en amont, à la réalisation d’un feedback. Non seulement cette formation leur permettra de développer une compétence qui les suivra dans leur vie professionnelle, mais elle leur permettra d’affiner les retours qu’ils feront à leurs camarades.

L’une des grandes satisfactions du regard que nous pouvons aujourd’hui porter sur cette année d’apprentissage, c’est que les étudiants ne sont pas les seuls à valider la méthode. Nous avons demandé aux professeurs qui ont choisi de l’utiliser de nous faire un retour d’expérience. Et tous l’ont recommandée à leurs collègues qui restaient encore à convaincre. Avec la méthode classique, « certains étudiants introvertis ne participent pas, mais le pair-à-pair leur permet de s’investir. Grâce aux feedbacks, tous les étudiants sont inclus », m’a assuré Adeline Lecardez. « J’avais l’impression de me reconnecter avec le niveau réel des étudiants, il y avait aussi beaucoup plus de questions en cours », m’a même confirmé un autre enseignant, dont le cours est désormais pleinement tourné vers l’échange avec ses étudiants.


« L’enseignant peut prendre la mesure de ce que les étudiants ont compris ou non »

Quatre questions à Vaitea Jacquier, Responsable de l’Innovation Pédagogique au sein de la Direction Innovation & Learner Experience de SKEMA Business School

1/ Avec cette méthode du pair-à-pair, on pourrait penser que les étudiants sont livrés à eux-mêmes…

Il est vrai qu’on peut être tenté d’associer le pair-à-pair au fait de laisser les étudiants seuls entre eux. Ce n’est pas le cas. Le pair-à-pair, lorsqu’il est bien scénarisé, favorise l’autonomie des étudiants et leur engagement dans leur processus d’apprentissage en leur permettant de se familiariser avec les critères d’évaluation. Des critères qu’ils peuvent alors s’approprier tout en ajustant, si besoin, leurs stratégies d’apprentissage. Ils ne sont par ailleurs pas « lâchés » dans le grand bain sans préparation. Un « onbarding » est réalisé pour eux et avec eux afin qu’ils comprennent le sens de cette approche et les attendus. En réalité, les étudiants sont aussi encadrés par une structuration des séances d’apprentissage définie bien en amont des cours, avec un planning clair et daté de travaux à faire, d’évaluations et de feedbacks à fournir avant les séances en présentiel avec l’enseignant. Les étudiants ainsi investis ont plus d’interrogations lors de cette séance, et l’enseignant peut prendre la mesure de ce que les étudiants ont compris ou non, ce qui rend ces séances plus interactives et pertinentes.

Le profil de nos étudiants est adapté à ce type de pédagogie. Nous mesurons leur appropriation par le biais de questionnaires, mais aussi en étudiant leur investissement et leur réussite. La prochaine étape, que nous en sommes en train de préparer, est de passer à une dynamique de développement de compétences (et de mesure de ce développement) autour de cette approche pédagogique. Cela veut dire que nous ne mesurerons plus uniquement le résultat, mais le processus d’apprentissage tout au long du parcours des étudiants à SKEMA. Nous travaillons en ce sens avec Challenge Me dans le cadre d’un partenariat très spécifique. Un projet pilote est lancé, nous aurons très prochainement les résultats.

2/ Cette méthode fait s’entre-corriger les étudiants, comment les professeurs peuvent-ils suivre la progression de chacun d’eux ?

Cette approche de pair-à-pair croise celle dite de « la classe inversée ». Les étudiants travaillent de façon asynchrone (en distanciel et en ligne) avant de travailler avec l’enseignant de façon synchrone (en présentiel). Il est donc indispensable, pour que cela soit efficace, que les outils mobilisés soient adaptés aux usages pédagogiques. La présentation de l’approche, les objectifs du cours, l’organisation des séances de cours ou encore les rendus attendus sont donc explicités sur notre Learning Management System (LMS), sur lequel une plateforme spécifique au pair-à-pair (choisie pour sa facilité de prise en main, l’apport organisationnel pour les enseignants et les étudiants par le biais d’une automatisation) a été intégrée. Les enseignants ont, de leur côté, un tableau de bord leur permettant de suivre à chaque étape le nombre d’étudiants ayant finalisé les étapes, les rendus des étudiants, les feedbacks fournis, etc. et peuvent visualiser rapidement par un graphique ce qui semble être acquis ou non.

3/ Comment saviez-vous que ça fonctionnerait ?

Avant de lancer de telles mises en œuvre, nous mettons bien sûr toujours en place des dispositifs pilotes. Ils nous permettent de tester l’approche pédagogique, l’appropriation des étudiants, et l’interopérabilité de l’outil avec notre écosystème digital. L’équipe d’ingénieurs pédagogiques de l’Innovation Pédagogique coordonne et suit de près toute la mise en œuvre jusqu’à la finalisation des cours pour pouvoir mesurer, au fil de l’eau, l’appropriation de toutes les parties prenantes (enseignants et étudiants). L’équipe peut ainsi procéder à des remédiations en cours de route si besoin. Nous faisons beaucoup de retours d’expérience des dispositifs pédagogiques lancés en collaboration avec l’Innovation Pédagogique. Le pair-à-pair fait maintenant partie des approches pédagogiques les plus mobilisées à SKEMA : l’expertise d’accompagnement des enseignants est là, les outils également, et les modalités de l’approche sont ajustables et déclinables à tous types d’objectifs.

4/ Vous avez présenté ce projet-pilote devant un parterre d’universitaires : comment ont-ils réagi ?

Tout à fait ! Il me semble impensable de conseiller les enseignants en développements pédagogiques, d’innover dans ce domaine, sans y intégrer une dimension de recherche pour prendre la mesure de ce que nous faisons et des biais potentiels dont il faut pouvoir tenir compte et qui vont au-delà de la salle de classe. J’ai donc tenu à ce que l’Innovation Pédagogique lance une approche dite « SoTL » (Scholarship of Teaching Learning) dans le cadre des accompagnements pédagogiques. En somme, cela revient non pas uniquement à diagnostiquer un problème de terrain, conseiller et mettre en œuvre une nouvelle dynamique d’enseignement/apprentissage, mais aussi à inviter l’enseignant (et l’accompagner en ce sens) à formuler une hypothèse pédagogique, qu’il s’agit de mesurer par le biais de recueil de données qui sont ensuite analysées. De cette façon, chaque projet pédagogique peut devenir un terrain de recherche-action encadré par le comité d’éthique que nous avons à SKEMA. Cela nous permet de continuer à nous documenter sur notre terrain pédagogique et d’ajuster nos conseils à nos besoins spécifiques, mais aussi de valoriser différemment nos pratiques pédagogiques.

Nous avons ainsi été acceptés pour communiquer dans le cadre du colloque de l’Association Internationale de Pédagogie Universitaire (AIPU) ; une première pour notre école ! J’ai moi-même un parcours très universitaire, et il est vrai que les attentes peuvent être très différentes de celles d’autres types d’événements de partage. Ici, nous avons été la seule école de commerce à communiquer, et nous avons créé la surprise en présentant un travail rigoureux et dans les normes de colloque en didactique. Nous avons eu un grand nombre de participants, curieux, enthousiastes et ravis d’avoir un retour de terrain différent des terrains universitaires qu’ils connaissent. Ces réflexions liées à des organisations, des pratiques, des contextes, des dynamiques et des publics variés sont très enrichissantes pour tout le monde : on interroge le connu pour dessiner d’autres voies.



Qu’est ce que l’ESDHEM ?

L’ESDHEM est un double cursus dont la spécificité est d’associer un parcours diplômant à la préparation aux concours des Grandes Ecoles de commerce.

Depuis plus de 25 ans, le programme ESDHEM associe :

  • une licence universitaire de droit privé ou d’économie-gestion
  • la préparation aux concours des Grandes Écoles
  • des stages en entreprises
  • un semestre à l’international
  • la vie associative

Nous préparons nos étudiants aux concours d’Admissions sur Titre (AST) qu’ils peuvent présenter au choix en fin de 2ème année et/ou de 3ème année.

Ces concours sont ouverts à des élèves aux profils très variés et notre programme de préparation les amène à enrichir leur profil et à construire leur projet professionnel.
Les élèves sont répartis par petits groupes, ce qui favorise un meilleur apprentissage et une proximité avec l’équipe pédagogique.

Le programme ESDHEM est dispensé au sein des campus SKEMA : nos étudiants bénéficient ainsi de l’environnement et des ressources d’une Grande École.

Mathieu Villars

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