Le “healthy lifestyle” bon pour la santé, moins pour la planète !

Le “healthy lifestyle” bon pour la santé, moins pour la planète !

« Manger sain » : telles sont aujourd’hui les recommandations martelées par l’OMS et l’ANSES (Agence française de sécurité sanitaire). Tout le problème qui se cache derrière cette injonction est que la consommation frénétique de certains aliments dits « healthy » menace directement l’environnement, notamment nos ressources en eau.

Le « manger sain », une tendance devenue norme

Manger sain consiste à se préoccuper de son bien-être en s’alimentant sur la base de deux principes : privilégier une alimentation à tendance végétarienne (fruits, légumes, graines) et pratiquer une activité physique régulière (musculation, fitness, yoga…). Synonyme de bonne santé, le « healthy way of life » est devenu un thème récurrent sur les réseaux sociaux avec par exemple plus de 166 millions de clichés tagués #healthy sur Instagram.

Une demande croissante qui menace une ressource naturelle déjà fragile

L’une des stars de nos assiettes « healthy » est l’avocat : il connait un grand succès auprès de la population végétarienne. Et pour cause, l’avocat est très riche en fibres, en vitamines C, E et K et aurait en outre des vertus anti-cancer. La consommation d’avocats a connu une période faste ces dernières années : aux États-Unis par exemple, elle a atteint 1,1 million de tonnes en 2018. Mais cette production est très gourmande en eau : 1000 litres sont nécessaires pour un kilo d’avocats, contre 130 pour un kilo de salade. L’impact négatif de cette production est à la fois environnemental et social. D’après le National Geographic, les régions où l’avocatier est cultivé sont souvent touchées par des pénuries en eau. Un autre aliment phare de nos pratiques de consommation « healthy » est l’amande. Riche en vitamines E, B2 et B3, elle contribue à diminuer les risques d’accidents cardio-vasculaires, comme l’a montré une expérience réalisée aux Etats-Unis en 2003.

Davantage que l’avocat, la production d’amande est gourmande en eau : il faut 4000 litres pour produire un kilo, soit un total de 4 litres par amande. Quel désastre en matière de respect de l’environnement et des ressources mondiales en eau !

Source : l’impact environnemental de notre alimentation : le cas de l’eau (Jimini’s.com)

La Californie est le plus gros producteur d’amandes avec 80% de la production mondiale. Or, cet Etat connaît depuis plusieurs années une situation de sécheresse sans précédent. La situation est aggravée par le fait que les amandes doivent être cultivées toute l’année ce qui nécessite un apport constant en eau. Les producteurs d’amandes sont donc amenés à pomper les nappes d’eau souterraines. Cette pratique, autorisée par les autorités californiennes, entraine mécaniquement une hausse du prix de l’eau qui, à son tour, pousse les agriculteurs à planter plus d’amandiers afin de réaliser des bénéfices. Ce cercle vicieux épuise les réserves d’eau à un rythme effréné. Qui plus est, l’assèchement des nappes provoque un affaissement inquiétant des sols que confirment les relevés topographiques de l’Agence spatiale américaine. La vallée de San Joaquin subit un affaissement de près de 5 cm par mois, ce qui constitue une réelle menace pour les infrastructures locales.

Maps of dry season (September–November) total water storage anomalies (in mm equivalent water height; anomalies with respect to 2005–2010) in the western United States. (Famiglietti et al, 2014)

Un arbitrage délicat

La solution est-elle alors d’arrêter de manger des amandes ? Pas forcément, notamment si les pratiques healthy s’accompagnent d’une réduction de la consommation de viande rouge laquelle est, de loin, la plus vorace en eau. En effet,  15 000 litres d’eau sont nécessaires pour produire un kilo de bœuf. En outre, selon une étude menée par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, la production de viande serait responsable de 14% des émissions totales de gaz à effet de serre.

De façon plus générale, la FAO a proposé un certain nombre de recommandations visant à concilier alimentation saine et impact environnemental :

  • diversifier et mieux cibler le contenu de nos assiettes en introduisant davantage de graines, fruits, légumes et noix,
  • diminuer la consommation de viande rouge et limiter celle de poisson, produits laitiers et volailles tout en privilégiant des aliments plus frugaux en eau,
  • privilégier les filières et savoir-faire locaux,

Faute de pratiquer ces arbitrages, les ajustements viendront de la nature elle-même, dramatiques et irréversibles comme la vague d’incendies qui vient de frapper la Californie.

Rodolphe DesbordesProfessor of Economics, RISE² Research Centre, SKEMA Business School - University Côte d'Azur, France

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Frédéric MunierProfesseur de Géopolitique, SKEMA Business School

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Margaux HaywardMargaux Hayward, Etudiante PGE, SKEMA Business School

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Loane ManhenkeLoane Manhenke, Etudiante PGE, SKEMA Business School

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Hugo PetitHugo Petit, Etudiant PGE, SKEMA Business School

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